Pour celles et ceux qui prennent quotidiennement la ligne 13, les déclarations des politiques de Gauche et de Droite qui se sont écharpés la semaine dernière sont profondément insultantes. En relisant ce week-end l'ensemble des articles, communiqués et autres déclarations de Mme PECRESSE, de Mme HIDALGO, ou de M. TROUSSEL, je me suis demandé s'ils avaient de la décence. Si la classe politique française veut dégoûter et humilier les citoyens en les transformant en spectateur de leurs petites luttes, elle ne s'y prendrait pas autrement. Aux yeux de beaucoup d'hommes politiques, les promesses ne sont pas faites pour être tenues et les difficultés de leurs concitoyens ne comptent pas. Comment peuvent-ils ensuite s'étonner qu'un grand nombre de personnes ne votent plus, ou plus pour eux, et qu'une méfiance généralisée ressortent des sondages ?
Revenons sur les faits. Mardi dernier, le 12 septembre 2018, Valérie PECRESSE, Présidente de la région Ile-de-France depuis décembre 2015 et également Présidente de l'autorité organisatrice des transports régionaux Ile-de-France Mobilités -IDM- (anciennement le STIF -Syndicat des Transports d'Ile-de-France-), visite le Poste de Commandement Centralisé de la ligne de métro numéro 13 situé au terminus sud de la ligne à Malakoff, où elle fait des annonces pour améliorer le fonctionnement de la ligne.
La plupart reprennent des idées et mesures déjà employées par le passé : améliorer l'information diffusée au voyageur, assurer la propreté, mettre davantage d'agents sur les quais, renforcer les alternatives à la ligne 13, en particulier le réseau de bus, etc... Cependant, deux points ont fait l'objet d'échanges dans la presse et un dernier a plus particulièrement attiré l'attention du Président d'association d'usagers de transport en commun que je suis.
La première annonce qui a donné lieu à une passe d'armes entre ces élus de Gauche et de Droite est le retrait des strapontins.
L'opposition de Gauche à Valérie PECRESSE s'est immédiatement emparée du ridicule de cette proposition pour la dénoncer. Ainsi, Anne HIDALGO, Maire de Paris, et Stéphane TROUSSEL, Président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, ont, à juste titre, attaqué le peu de sérieux d'une telle mesure. Un communiqué de presse conjoint a d'ailleurs été publié. Le Parisien du 12 septembre dernier nous apprend que le retrait de ces strapontins permettrait de gagner 14 % d'espaces en plus ! Les crânes d'oeufs qui ont fait ce calcul doivent jubiler et s'imaginer qu'ils pourront augmenter le nombre de personnes par m² dans les rames. Par contre, ils ne semblent pas pouvoir s'imaginer que les passagers n'ont aucunement envie de laisser se dégrader leurs conditions de voyage. Ceci dit une telle initiative n'est pas nouvelle, puisque la modernisation des rames avait été l'occasion de renforcer le chassis des rames de métro et de pouvoir accueillir 5 % de passagers supplémentaires (déclaration d'un ingénieur de la RATP au cours d'un comité de ligne il y a quelques années).
Concernant la mesure elle-même, s'il est vrai que chacun de nous a pu constater un c... assis dans une rame bondée ignorant les remarques qui lui sont faites, nous savons également que ce type de comportement reste exceptionnel. Sauf à ce que Valérie PECRESSE vise à travers le retrait des strapontins les personnes âgées ou handicapées qui ont besoin de s'asseoir et pour lesquelles les voyageurs, même entassés et fatigués, sont bienveillants, il n'est pas justifié d'enlever les strapontins. Pour gagner de la place, Valérie PECRESSE pourrait tout aussi bien proposer d'enlever toutes les places assises. S'en prendre aux strapontins est donc parfaitement grotesque.
Mes parents m'ont appris à aider une personne âgée. Certains politiques n'ont pas la même conception de la solidarité...
La deuxième annonce qui a entraîné de nombreuses réactions entre politiques est la mise en service de nouvelles rames de métro.
La ligne 13 est équipée de rames de type MF77 modernisés à la fin des années 2000. La faillite de la société Ansaldo-Breda, qui avait le contrat initial, a entraîné d'importants retards dans le programme de modernisation. Plus de quatre années seront nécessaires pour moderniser toutes les rames (66 au total) au lieu de deux. Aujourd'hui, les voyageurs de la ligne 13 empruntent chaque jour des rames qui roulent depuis 40 ans pour les plus anciennes... La première MF77 a été mise en service sur la ligne 13 en septembre 1978.
Le 12 septembre, Valérie PECRESSE a annoncé que les rames qui succéderont à ces MF 77 arriveraient à partir de 2026. Cette annonce a provoqué un tollé chez le duo précédemment nommé, qui a appelé à accélérer ce calendrier. Si la Présidente de la région Ile-de-France semble peu se soucier de nos conditions de voyage au point de vouloir supprimer des strapontins, la réaction d'Anne HIDALGO et de Stéphane TROUSSEL témoigne de sentiments identiques.
En effet, le calendrier de renouvellement des rames avance leur mise en service par rapport à la date prévue dans le calendrier précédemment établi par la majorité de
Gauche, qui a dirigé la région Ile-de-France jusqu'en décembre 2015. Pour ces
élus de Gauche à la mémoire courte, le STIF prévoyait, dans le schéma directeur du matériel métro arrêté le 13 décembre 2013 par son conseil d'administration (décision n°2013-534), de renouveler les rames de la ligne
13 en 2029, voire en 2034 (plusieurs scénarios figurent dans le document) ! Réclamer le changement immédiat des rames
de la ligne 13 relève de la pure démagogie, puisqu'eux-mêmes le prévoyaient à une date plus tardive. Que ne ferait-on pas pour exister
dans les médias et se faire passer pour ce que l'on n'est pas !
A titre personnel, je considère néanmoins que le nouveau calendrier manque d'ambition. A la décharge de Valérie PECRESSE, comme des élus de la Gauche caviars précédemment cités, la souffrance des habitants de la région, notamment des plus modestes
vivant en Seine-Saint-Denis et dans la boucle nord des Hauts-de-Seine,
leur échappe, de même que l'image de marque de Paris
et de sa région, qui sera scrutée pendant l'été 2024 par les touristes
et médias du monde entier venus pour les Jeux Olympiques.
Pour ceux qui l'oublient, la Seine-Saint-Denis, et plus particulièrement sa partie Ouest, ainsi que le Nord des Hauts-de-Seine, concentrent les populations les plus modestes de la région, qui sont les plus touchés par le chômage. Cette ségrégation territoriale, qui a un fondement politique, puisqu'elle renvoie au partage du département de la Seine par les Gaullistes et les Communistes dans les années 1960 et aux stratégies politiques de ghettoïsation/clientélisme qui ont fait l'objet d'un accord entre les élus de Droite et de Gauche (aux uns les résidences avec les cadres, aux autres les logements sociaux avec les populations immigrés), se double d'une punition en matière de qualité des transports en commun. Pour les politiques de Gauche et de Droite, peu importe que les gens qui gagnent le SMIC souffrent dans leur vie personnelle et professionnelle d'un service dégradé (difficulté à trouver un emploi, menaces sur son emploi en cas de retards, temps réduit consacré aux enfants, vie de famille en berne...), puisqu'ils n'ont pas à donner leur avis.
Les Jeux Olympiques de 2024 seront autant ceux de Paris que de la
Seine-Saint-Denis, qui accueille plus du tiers des épreuves. Ce
n'est pas la ligne 14 qui transportera touristes et médias au Centre Aquatique et au
Stade de France (le futur terminus nord de la première ligne de métro automatique, Saint-Denis-Pleyel, est très loin des installations sportives, à l'ouest du réseau ferroviaire de Paris Nord), mais la ligne 13. Ils descendront à la station
Porte-de-Paris, celle que je prends tous les matins et tous les soirs contrairement aux hommes politiques de Droite et de Gauche qui circulent en voiture.
Enfin, un dernier sujet a été à peine évoqué dans les médias, alors qu'il est essentiel. Il s'agit de l'automatisation de la ligne 13.
En lisant dans l'édition du 12 septembre des Echos, grand quotidien économique, que la question de l'automatisation était en suspens, je suis tombé de ma chaise.
Amis lecteurs, souvenons-nous que pendant la campagne des élections régionales de 2015, Valérie PECRESSE, candidate de la Droite, avait fait cette proposition de campagne, immédiatement reprise et ajoutée à son programme par son concurrent de Gauche, Claude BARTOLONE. Tous les partis traditionnels de Droite (Les Républicains, l'UDI) et de Gauche (PS, PRG, PCF, Front de Gauche et EELV) ont promis l'automatisation de la ligne 13.
En juillet dernier, le Directeur général d'Ile-de-France Mobilités, Laurent PROBST, annonçait que l'automatisation de la ligne 13 était "prioritaire" (cf. l'hebdomadaire l'Usine Nouvelle). La lecture de divers articles m'avait rassuré, car j'étais ressorti très inquiet du Comité de ligne du printemps dernier. Le vice-président en charge des transports en commun, Brice NKONDA, avait annoncé, sans conviction aucune, le lancement d'une étude sur l'automatisation de la 13. Presque trois ans après leur conquête de la région, la Droite se préoccupait enfin de cette promesse. Il faut dire que la Gauche ne l'avait pas incité à agir plus rapidement. Personne n'était manifestement pressé d'honorer cette promesse, qui aurait dû être consensuelle. Seuls les représentants des associations d'usagers, dont votre serviteur, ont évoqué le sujet. Les politiques présents avaient d'autres préoccupations.
Aujourd'hui, je croise les doigts pour éviter un enterrement en première classe de ce projet. Disons-le tout net, le problème n'est pas la réalisation technique. Elle peut être complexe, mais elle est faisable. Le problème est financier. Les élus ont envie de mettre l'argent dans des projets plus rentables électoralement. A Droite, le raisonnement est simple : les habitants de ces territoires ne votent pas pour nous. A Gauche, le raisonnement est simpliste : ils votent déjà pour nous et les problèmes de transport crédibilisent nos discours consistant à accuser l'Etat et la Droite de tous les maux. En outre, régler les problèmes de la ligne 13 conduirait inévitablement à s'interroger sur les raisons de la croissance du trafic, c'est-à-dire le bétonnage intensif de nombreuses villes de banlieue par des élus prétendument de Gauche et écologistes... Le Territoire (anciennement la Communauté d'agglomération) Plaine Commune, qui a eu pendant des années un discours offensif à l'égard du STIF et de la RATP sur la ligne 13, a maintenant mis en veille ses revendications. Plus de demande de dédoublement, plus de dénonciations de la saturation... Tout va bien. D'ailleurs, la 14 prolongée va desservir la future zone d'activités de Pleyel (élus de Gauche et promoteurs sont ravis).
Automatiser la ligne 13, c'est obtenir de nouvelles rames plus fiables et confortables. C'est également, garantir l'installation de portes palières dans toutes
les stations, ce qui accroît la sécurité et la régularité des métros.
C'est enfin s'assurer de la régularité du passage de ce qui n'est qu'un demi-métro au-delà de la Fourche. De cette constance dépend le nombre d'incidents de circulation. Hier matin, j'arrive sur le quai de la station Porte de Paris au moment où part un métro. La rame suivante est arrivée presque cinq minutes après, alors qu'elle aurait dû mettre un peu plus de trois minutes. Le résultat ne s'est pas fait attendre, les gens devaient jouer des coudes pour monter dans une rame bondée et les difficultés ont empiré aux stations suivantes. Le temps de stationnement du métro à chaque station augmentait pour permettre la montée et la sortie des passagers, entraînant une tension de plus en plus forte entre passagers qui ne s'est apaisée qu'à Saint-Lazare
Pour conclure, j'ajouterai que l'automatisation pourrait être la première étape vers une résolution de la saturation de la ligne 13 posée par la Fourche, qui divise en deux le trafic sur la partie nord de la ligne. En automatisant la ligne, la Fourche pourrait devenir une solution et non plus un problème. L'association Saint-Denis Transports attendra de connaître le résultat des études demandées par Ile-de-France Mobilités pour présenter ses réflexions et propositions.
Mise à jour du samedi 22 septembre : comme je le soupçonnais, Valérie PECRESSE veut se servir du coût financier et... social (venant de la Droite qui ne sait plus ce que sont les classes populaires, c'est l'hôpital qui se fout de la charité...) pour justifier l'abandon de l'automatisation de la ligne 13. Lisez l'article en ligne du Parisien du 21 septembre. Comme je l'écrivais ci-dessus, elle n'a que faire des habitants les plus pauvres de la région. Un métro automatisé ? C'est bon pour une ville de Droite, en l'occurrence Saint-Ouen, avec la ligne 14.
jeudi 20 septembre 2018
Métro parisien - Ligne 13 : quand les élus de la région de Droite et de Gauche renoncent à leur promesse et se moquent des habitants les plus modestes (MaJ : un article du Parisien du vendredi 21 septembre confirme que Valérie PECRESSE veut enterrer l'automatisation de la ligne en prétextant le coût financier et... social)
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