samedi 22 décembre 2012

Quand la Droite et les Gauches de gauche défendent une mixité sociale de juxtaposition entraînant une ségrégation urbaine, sociale et ethnique

Le 18 novembre dernier, dans l'émission Périphéries d'Edouard ZAMBEAUX sur France Inter, le journaliste était allé à la rencontre de Catherine ARENOU, maire UMP de Chanteloup-les-Vignes, commune de 10 000 habitants des Yvelines. L'objectif était de comprendre les difficultés d'un "maire d'une ville pauvre", un coup de projecteur étant mis sur la situation de ces communes par la grève de la faim de Stéphane GATIGNON, maire de Sevran, commune de Seine-Saint-Denis confrontée à des difficultés budgétaires. Voici le lien pour écouter cette émission.

Tout au long de cette émission, on pouvait, au fond, partager les combats de cette maire. Malgré des ressources financières contraintes (plus de 70 % de ses administrés ne sont pas imposables et la masse salariale représente plus de 60 % de son budget), elle se débat pour offrir à des coûts très faibles des services publics, comme la cantine scolaire ou des activités de centres de loisirs pour les enfants. Son constat, sur le fait de devoir mettre des hommes devant des populations fragiles, et non de l'informatique, est très juste, de même que celui sur la précarisation croissante des populations (constante hausse des demandes auprès des associations caritatives pour pouvoir se nourrir, hausse des impayés de loyers).

Pour autant, la conclusion que la maire nous livre dans les dernières secondes de cette courte émission (8 minutes) est sidérante, mais révélatrice d'une volonté partagée par les élus de Droite et de la Gauche de la Gauche : séparer les populations pauvres des populations riches. Remercions donc de sa franchise Mme ARENOU, quand d'autres élus, comme ces hypocrites gauche de gauche qui nous dirigent à Saint-Denis, font la même politique, sous le fallacieux prétexte "de ne pas chasser les pauvres".

Avant d'aller plus avant, je vous retranscris la conclusion :
" Si la ville de Chanteloup a des besoins, c'est parce que, de son côté, elle porte une partie de la solidarité nationale. Si elle a 75 % de personnes qui habitent dans le logement social actuellement, c'est pas un choix, c'est un fait ! Ce fait, moi, je l'assume complètement, je suis tout à fait en capacité d'accompagner ces populations. Mais, ce que je veux, c'est qu'on me donne des moyens de le porter. Si moi, 75 % des habitants sont dans le logement social, et qu'à côté, il y en a 5 % dans le logement social dans la ville d'à côté. Fatalement, je porte sa solidarité. Donc, qu'elle me donne les moyens de porter sa solidarité."

Contrairement à ces élus à la faible, pour ne pas dire inexistante, conscience républicaine, je suis opposé à une mixité sociale de juxtaposition, dont la conséquence est la relégation des populations les modestes et souvent d'origine étrangères, en périphérie des centres urbains dans des cités repliées sur elle-même. Aucune ville ne devrait avoir plus de 50 % de son parc de logement composé de logements sociaux, comme c'est le cas à Chanteloup-les Vignes ou chez nous, à Saint-Denis. 

Je suis favorable à une mixité sociale de mélange, qui obligerait chaque commune à avoir une proportion de logements sociaux équivalente à 30 % de son parc de logements. C'est à Neuilly-sur-Seine ou à Levallois que des logements sociaux doivent être construits, et non à Saint-Denis. Il faut au contraire proposer aux Dionysiens, qui vivent dans les cités où ils étouffent, de pouvoir habiter à Neuilly !

Il faut que les populations se mélangent, se rencontrent pour que chacun se rappelle, ou apprenne, que l'Humanité est une ! Il ne faut surtout pas renvoyer les femmes et les hommes à leurs déterminants sociaux. Mon pays, notre pays, ne doit pas prendre le chemin de l'Amérique et de sa ségrégation institutionnalisée ! 

Le drame de la politique immobilière actuelle est que l'on ne construit pas assez de logements sociaux. Le paradoxe, mais qui n'est qu'apparent, c'est que si ce constat est partagé par tous les hommes politiques, chercheurs, spécialistes et autres observateurs de l'évolution de notre pays, peu nombreux sont ceux qui osent pousser le raisonnement jusqu'au bout et en tirer toutes les conséquences, à savoir que les logements sociaux construits le sont toujours dans les mêmes communes. La ségrégation socio-spatiale, qui s'est progressivement mise en place à partir de la fin des années 1970, est constamment renforcée, avec la bénédiction des élus Gauche de Gauche et de la Droite.

Le projet du Grand Paris et le Schéma Directeur de la Région Ile-de-France (SDRIF) en sont les derniers exemples lamentables. La part du logement social, qui représente 35 % du parc de logement en Seine-Saint-Denis en 2005, devrait ainsi s'élever à 44 % à l'horizon 2030.

Plusieurs maires socialistes de Seine-Saint-Denis se sont donc élevés contre cette perspective, exigeant un rééquilibrage avec les Hauts-de-Seine, et dénonçant cette stratégie des élus gauche de gauche du département, comme Patrick BRAOUEZEC, motivés par des considérations électorales. Rappelez-vous que je vous ai dit à plusieurs reprises que ces élus dévoyés qui se disent gauche de gauche portent les stigmates des fossoyeurs de la démocratie : clientélisme et démagogie.

Alors, amis lecteurs, comment, me direz-vous, pouvons-nous parvenir à cette mixité sociale de mélange ?

1) Tout simplement, en en finissant avec Patrick BRAOUEZEC et ses lieutenants, hommes politiques hypocrites

Amis lecteurs, notre ex-député et ses lieutenants se disent gauche de gauche. D'ailleurs, Patrick BRAOUEZEC a rejoint un groupuscule appelé la Fédérération pour une Alternative Sociale et Ecologique (FASE), qui relève de ce que l'on appelle la gauche radicale. A priori, ces gens là devraient défendre une mixité sociale de mélange et non une mixité sociale de juxtaposition. 

Et bien non ! Mesurez d'ailleurs le décalage.

Voici ce que dit notre cher ex-député dans une interview donnée au quotidien l'Humanité du 11 décembre dernier : "La centralité doit être partout, la périphérie nulle part. Notre travail intéresse beaucoup de métropoles dans le monde. La plupart se construisent sur la base de l'exclusion. Soit c'est la gentrification du centre et la ghettoïsation de la périphérie, soit c'est le contraire. Nous, nous voulons une métropole inclusive, une métropole solidaire où le vivre ensemble n'est pas le vivre côte à côte". Il s'agit là d'un propos destiné à être largement lu par un peuple de gauche, dont fait partie la population Dionysienne. 

Maintenant, voici ce qu'il pense et livre aux rares lecteurs (forcément des spécialistes très éloignés dans leurs modes de vie et leurs pensées des Dionysiens) qui auront mis la main sur son livre d'entretien avec Jean VIARD "Mais où va la ville populaire ?" (édition de l'aube, 2012). Le son de cloche est tout autre : "Vous parliez de ghetto tout à l'heure : le ghetto de riches est sans doute beaucoup plus réel et répandu que le ghetto de pauvres. Je ne connais pas vraiment de ghettos de pauvres mais je connais l'existence des ghettos de riches. Le risque, au nom de la diversité sociale, c'est qu'un certain nombre de gens ne trouvent plus leur place dans les ville qui opèrent peu à peu des substitutions de populations en faveur des plus aisés. Et les plus pauvres, où vont-ils ? Personne n'est prêt à les accueillir. Nous sommes aussi dans une réalité où il ne faut pas se raconter d'histoires. Il n'y aura pas, ni spontanément ni même par des politiques de transfert volontaire, des gens en difficulté qui iront habiter à Neuilly-sur-Seine."

Oui, vous avez bien lu, un représentant éminent de la gauche radicale, un véritable gauche de gauche comme il aime à se définir lui-même, ne résiste pas, que dis-je, cède au capitalisme financier. Patrick BRAOUEZEC ne remet pas en cause la ségrégation urbaine, sociale et ethnique qui s'est mise en place dans la région Ile-de-France. Les riches ont de la chance, puisque Patrick BRAOUEZEC devancent leur souhait en construisant loin de leurs villas cossus des barres en béton où il parquera leurs domestiques et autres employés de maison/employés invisibles que les nantis ne veulent pas cotôyer plus de quelques minutes ou quelques heures par jour.

En refusant d'imposer une autre politique en matière immobilière et en collaborant avec les nantis, Patrick BRAOUEZEC et ses lieutenants encouragent la ségrégation en Ile-de-France.

Pourquoi une telle affirmation ? Parce que le maître de Plaine Commune n'ignore pas qu'un promoteur voulant élever du bureau à Neuilly-sur-Seine trouvera toujours du foncier, même des parcelles déjà bâties à transformer. De même qu'il n'ignore pas qu'il suffirait de confier le pouvoir foncier des maires aux préfets pour que l'Etat puisse enfin imposer ce rééquilibrage aux communes qui sont dépourvues de logements sociaux. Mais notre baron local n'a pas l'intention de lâcher la moindre compétence. Il y a quelques jours, il a d'ailleurs participé au torpillage en règle du Livre Blanc de Paris métropole, en s'opposant à la création d'une Autorité en charge des logements à l'échelle régionale.

Saint-Denis n'a pas à être une "ville populaire", de même que Neuilly-sur-Seine n'a pas à être une "ville bourgeoise". Je le dis et je le répète, il faut du logement social partout.

2) Mais aussi, en en finissant avec le discours populiste et démagogue : "chasser les pauvres"

Le bénéficiaire d'un logement social en dispose à vie, peut même le transmettre à ses enfants et, surtout, bénéficie d'un droit au relogement sur sa commune. Ce que je viens de dire signifie que la moitié des habitants qui vivent dans le parc social de notre ville sont assurés de ne jamais en être chassé. S'ils en partent, ce sera de leur plein gré.

Quant aux habitants vivant dans des logements du parc privé insalubres, quels sont leurs droits ? Le propriétaire d'un tel logement a l'obligation de reloger ses locataires. Je pose là une question : faut-il laisser des enfants vivre dans des environnements malsains où ils sont victimes du saturnisme ou d'autres maladies affectant, par exemple pour les maladies les plus courantes, les voies respiratoires ? Ou bien vaut-il mieux qu'ils résident dans des logements décents, quitte à devoir se refaire de nouveaux amis dans une autre école ?

En trompant les populations les plus fragiles, Patrick BRAOUEZEC et ses lieutenants se révèlent être les artisans de la ségrégation sociale et ethnique en Ile-de-France.

J'ajoute que, si la municipalité se substitue au propriétaire défaillant d'un logement insalubre pour exécuter les travaux, elle doit reloger les locataires sur son territoire. Si dès les années 1990, la mairie de Saint-Denis avait pris ce genre d'initiative contre les logements insalubres existants (et qui étaient moins nombreux qu'aujourd'hui), comme la loi l'y autorisait déjà,  le parc dionysien ne se serait pas continuellement dégradé et la problématique de l'insalubrité n'aurait pas cette ampleur. Les marchands de sommeil auraient compris qu'ils n'étaient pas les bienvenus. Mais ce message là ne leur a pas été envoyé. A dessein...

D'ailleurs, amis lecteurs, une question que nos élus gauche de gauche éludent : qui sont les populations chassées qu'ils semblent défendre ?

En réalité, il s'agit de la classe moyenne, de gens gagnant entre une fois et deux fois le SMIC, qui sont chassés de Paris et des départements de petite couronne en raison de l'évolution du marché du foncier et de l'immobilier (je crois qu'il est inutile que je vous parle de la hausse du m², en loyer ou en achat) et de la crise affectant un certain nombre de quartiers d'habitat social. J'ajoute que ces personnes souhaitent réaliser le rêve d'une écrasante majorité de nos concitoyens et devenir propriétaire d'une maison avec jardin.

Autant dire que ces populations, qui forment la base électorale des socialistes, des écologistes et du centre, n'ont pas la côte auprès de la municipalité gauche de gauche de Saint-Denis qui se réjouit secrètement de leur départ. Ne cherchez pas à comprendre pourquoi la gestion des ordures, le stationnement et d'autres choses qui relèvent des services normaux d'une ville dysfonctionnent à Saint-Denis. C'est une stratégie électorale qui dissuadent de s'établir ou chassent les classes moyennes.

3) Et enfin, en faisant le choix d'une autre politique que la DENSIFICATION

C'est le grand mot à la mode, la D-E-N-S-I-F-I-C-A-T-I-O-N !!! Nos élus gauche de gauche n'ont que cela à la bouche : la DENSIFICATION !

Ce néologisme leur sert de politique, de projet... Remarquez que pour des élus qui vivent leurs mandats comme des jobs, c'est commode. Ils sont dispensés de réfléchir à un vrai projet, de défendre des valeurs ou, plus simplement, de gérer une ville.

Pourtant, le concept de densification, quand on examine les motivations qui poussent nos élus à l'utiliser, sent furieusement la manipulation.

Vous noterez que, curieusement, nos élus gauche de gauche l'appellent pour Saint-Denis, mais ne la demandent pas pour des villes plus riches à l'urbanisme pavillonnaire. La raison, vous l'avez deviné, c'est de justifier le béton qui est destiné à couler à flot sur notre ville. Derrière la densification, on trouve cette alliance de nos élus gauche de gauche avec les, très libéraux, promoteurs immobiliers. La densification dissimule l'alliance de Patrick BRAOUEZEC et de ses lieutenants (n'oublions jamais les membres de sa cour !) avec le capitalisme financier. On est décidément très loin d'une alternative sociale et écologique.

Nos élus se servent de la densification pour afficher une politique écologique : lutte contre les émissions à effet de sphère générées par les voitures, lutte contre l'étalement urbain et le grignotage des terres arables. Seulement, la population française rêve à un pavillon. En conséquence, en densifiant à Saint-Denis, on cherche à imposer d'autres modes de vie et d'habitat à nos concitoyens. Autant dire que cela est voué à l'échec, car les mentalités ne changeront pas facilement et que la ségrégation les incitera encore plus à se tenir à l'écart de notre ville.

En favorisant la densification, Patrick BRAOUEZEC et ses lieutenants amplifient la ségrégation en Ile-de-France. 


S'il suffisait de changer la ville pour changer la vie des gens, on le saurait depuis longtemps. D'ailleurs, les milliards consacrées à la politique de la ville n'ont rien changé à la détresse de nombre de nos concitoyens. J'ajoute que cette vision autoritaire, méprisante et parfaitement capitalistique, se prive des politiques qui corrigeraient les effets négatifs environnementaux de l'étalement urbain : maison HQE, transport à la demande, auto-partage, développement de potagers biologiques, polarisation des équipements de proximité dans des micro-centralité.


Enfin, la densification ne pourra bien fonctionner que si l'on optimise l'ensemble des déplacements, en diminuant d'une part les transports individuels et en favorisant la fluidification et l'intermodalité des transports en commun. Or, le projet Saint-Denis Pleyel est l'inverse de cela. Saint-Denis Pleyel est un pôle de transport destiné à la spéculation immobilière. C'est pour cette raison que Plaine Commune l'a délibérément mis à côté de la ligne 13, en se gardant bien de le relier à notre ligne de métro. D'ailleurs, ils cherchent à saturer encore plus la ligne 13, comme si celle-ci ne l'était déjà pas assez.

Discuter de la densification est pourtant fondamental, car il renvoie aux choix urbains, c'est-à-dire à la ville que nous voulons construire, nous Dionysiens, et pas eux, élus gauche de gauche vendus au capitalisme financier. Mais nos chers élus le refusent. Le 28 novembre dernier, au cours d'une réunion préparatoire d'une séance du Comité Consultatif sur le Grand Paris, les deux maires-adjoints présents, M. Michel RIBAY et M. Christophe GIRARD ont refusé que l'on évoque la densification dans le projet d'avis des citoyens. Il est vrai que cela revenait à poser la question de l'articulation entre l'offre de transports et l'arrivée massive de nouvelles populations de salariés et d'habitants dans ce secteur. Je vous renvoie à mon billet du 21 novembre dernier. Ces deux créatures politiques en service commandé avaient certainement des consignes pour empêcher d'évoquer ce sujet du maître de Plaine Commune.


En conclusion, le processus de métropolisation, qui aboutit à une concentration toujours plus élevée des richesses humaines et matérielles, n'est pas remis en cause à Saint-Denis. Chaque habitant de notre ville souffrira à terme d'une ségrégation encore plus grande en raison des choix politiques et urbains qui sont ceux de la mairie de Saint-Denis et de Plaine Commune. 

En 2014, lors des élections municipales, nos concitoyens auront le choix entre le projet d'une gauche humaniste, à laquelle j'appartiens, visant un développement urbain et une cohésion sociale équilibrés, et le projet urbain et politique de la prédation financière et de la ségrégation socio-spatiale porté par de soit-disant élus gauche de gauche. Saint-Denis doit appartenir à ses habitants, pas à la mondialisation et aux dynamiques d'exclusion.